Femmes Montpelliéraines
Femmes célèbres montpelliéraines
Montpellier est certes connu depuis plusieurs siècles pour ses femmes à la beauté légendaire, mais la ville a donné naissance à de grandes dames qui se sont illustrées dans l'histoire et dans les arts. Vous trouverez ici le portrait de 17 d'entre-elles, sous forme de notices biographiques.
De Marie de Montpellier, première et unique femme seigneur de Montpellier (XIIIe siècle), à Laure Moulin, résistante et une des premières femmes élues au conseil municipal de Montpellier en mai 1945. Des bienfaitrices (Anne de Conty, Marie Caizergues), des écrivaines (la duchesse d’Abrantès, Josette Clotis, Lydie Wilson-de Ricard, Albertine Sarrazin), des résistantes (Simone Demangel et Suzanne Babut), des artistes (Jeanne Demessieux, Germaine Richier) et des personnalités qui ont marqué en leur temps la vie montpelliéraine (Francèse de Cezelli, Hélène d’Italie). Ces biographies illustrées de photographies et de documents d’archives s’inscrivent dans la continuité du Bulletin historique de la Ville de Montpellier n°40 consacré aux femmes de Montpellier.
Suzanne Babut (1887-1978)
Résistante et Juste parmi les Nations, petite-fille du célèbre botaniste Emile Planchon, Suzanne Emilie Eugénie Planchon est née à Montpellier le 22 février 1897, dans la maison familiale du chemin de Nazareth. Elle épouse en 1907 Ernest Théodore Babut (1875-1916), normalien, agrégé d’histoire, professeur à la Faculté des Lettres de Montpellier, spécialiste des débuts du christianisme en Gaule, et fils d’un célèbre pasteur protestant de Nîmes. Son mari est tué à l’ennemi durant la Première Guerre mondiale.
Veuve, elle transforme sa maison natale en pension de famille. A partir de l'automne 1942 jusqu’en 1945, elle héberge et cache une cinquantaine de Juifs à la pension Babut. En 1946, aux côtés du pasteur Jean Cadier, du maire Paul Boulet, de Simone Demangel et de Jeanne Atger, elle participe à la fondation de l’Abri Languedocien, association qui vient en aide aux filles mineures. Le 22 juin 1976, l'institut Yad Vashem de Jérusalem lui décerne le titre de Juste parmi les Nations. Elle décède à Nîmes en février 1978.
Suzanne Babut, vers 1960 © Comité Français pour Yad Vashem droits réservés.
Marie Caizergues (1797-1851)
Sœur Marie Anne Claire Caroline Caizergues, née à Montpellier le 8 Thermidor An V (26 juillet 1797), religieuse, fille de la Charité de saint Vincent de Paul, est une des principales bienfaitrices de l’Œuvre de la Miséricorde de Montpellier.
Fille d’un administrateur du bureau de bienfaisance, elle fait plusieurs legs à cette institution.
En 1848, elle donne plusieurs immeubles pour être « spécialement employés comme maison de santé pour les sœurs de la Charité et les orphelines ». A sa mort, le 31 mai 1851, elle en fait son héritier universel.
Sa propriété devient un établissement d’accueil destiné aux orphelins de la ville, puis une maison d’enfants à caractère social habilitée à accueillir les mineurs en difficultés sociales et familiales. Etablissement public communal depuis 1991, c’est aujourd’hui le centre Marie-Caizergues.
Les Dames de la Miséricorde. Tableau d'Auguste-Barthélémy Glaize, 1846. Ville de Montpellier, Apothicairerie de la Miséricorde.
Francèse de Cezelli (1558-1615)
Surnommée « la Jeanne d’Arc Languedocienne » pour avoir défendu la forteresse de Leucate assiégée par les armées espagnoles en 1590, Francèse de Cezelli est née à Montpellier le 28 mai 1558, fille d’un président à la Cour des Aides. Elle épouse en 1577 Jean de Bourcier de Pontaut, gouverneur de la place de Leucate, qui contrôle la frontière entre l’Espagne et la France.
Fidèle à Henri IV et au gouverneur de Languedoc Montmorency face aux Ligueurs ultra-catholiques qui contestent sa légitimité, son mari est fait prisonnier par les hommes du maréchal de Joyeuse du parti de la Ligue à l'été 1589. Ayant pris le commandement de la citadelle, Francèse de Cezelli refuse d’échanger Leucate contre sa libération. Jean de Bourcier est exécuté à Narbonne. Les Ligueurs font appel au roi d’Espagne pour renverser le nouveau monarque. Les armées espagnoles franchissent la frontière en 1590 et se présentent devant Leucate. Francèse s'illustre par sa bravoure et parvient à stopper l’avancée des Espagnols.
Henri IV lui confie alors officiellement les clés de la forteresse. Le roi aurait déclaré : « Je me fie plus à cette femme qu’au plus habile homme de mon royaume. Après tout, il est de la gloire de la France que l’on sache que les dames y valent les capitaines. » Elle décède à Montpellier le 16 octobre 1615. Une plaque sur sa maison natale rue du Petit-Scel honore sa mémoire.
Monument à Francèse de Cezelli. Statue de Ducuing élevée à Leucate en 1899. Albert Fabre. Album de l’Histoire de Montpellier, 5BIB208.
Josette Clotis (1910-1944)
Femme de lettres, écrivain et journaliste, Josette Clotis fut la compagne d’André Malraux.
Adrienne Elise Clotis naît à Montpellier le 8 avril 1910 d’un père militaire. Elle s’installe à Paris en 1932 comme journaliste à Marianne, hebdomadaire littéraire émanant de la NRF. Elle rencontre ainsi Gaston Gallimard qui publie son premier roman, avec un contrat d’exclusivité.
C’est là aussi qu’elle fait la connaissance d'André Malraux, qui devient son amant en décembre 1933. Elle l’accompagne en 1937 en Amérique pour collecter des fonds pour le gouvernement républicain espagnol. Victime d’un accident tragique à la gare de Saint-Chamant (Corrèze), elle décède le 12 novembre 1944 à Tulle.
Le Temps vert de Josette Clotis. Couverture de son premier roman, publié par Gallimard en 1932.
Anne de Conty d’Argencour (1641-1718)
Bienfaitrice de l’Œuvre de la Miséricorde, Anne de Conty d’Argencour serait née en 1641, fille de Pierre Conty d’Argencour, ingénieur des fortifications, surnommé « l’Archimède de Montpellier ».
Membre de la Maison de la reine Anne d’Autriche, elle serait devenue, selon Bussy-Rabutin dans son Histoire amoureuse des Gaules, la maîtresse du jeune Louis XIV et aurait été impliquée dans l’Affaire des Poisons. De retour à Montpellier, elle épouse Gabriel de Grasset, conseiller en la Cour des Aides. Elle décède le 9 janvier 1718 à Montpellier.
Dans son testament du 6 septembre 1715, elle lègue aux pauvres dont la congrégation des Dames de la Miséricorde prend soin, sa maison de la rue Montpelliéret, devenue depuis Maison de l’Œuvre de la Miséricorde puis siège du Bureau de Bienfaisance et Centre communal d’Aide sociale de la Ville.
Portrait d'Anne de Conty d’Argencourt attribué à Jean de Troy, XVIIe siècle. Ville de Montpellier, Apothicairerie de la Miséricorde.
Simone Demangel (1903-1995)
Résistante sous le nom de Pauline, conseillère municipale de Montpellier à la Libération, puis châtelaine d’Assas, Simone-Thérèse Demangel est la fille de l'historien d’art et académicien Louis Gillet (1876-1943). Née à Paris, elle épouse en 1927 Robert Demangel, polytechnicien. Le couple s’installe à Montpellier en 1928 à la nomination de son mari comme professeur à la faculté des Lettres.
Ayant suivi en Grève son mari nommé directeur de l'École française d'Athènes, Simone Demangel rentre seule avec ses enfants à Montpellier en 1939 par le dernier Orient Express. Durant la Seconde Guerre mondiale, par son engagement caritatif, elle devient proche du médecin et député Paul Boulet. Entrée dans la Résistance dès 1940 dans le mouvement Liberté, elle intègre un réseau pour faire passer des enfants juifs en Espagne et travaille ensuite pour le Major Flandre. Recherchée à Montpellier fin 1943, elle trouve refuge auprès du Capitaine Léon alias Bolivar (Henri Glaser) dans le secteur de Clermont-l’Hérault et entre dans la clandestinité comme agent de liaison pour le Mouvement national des prisonniers de guerre et déportés de Maurice Planès. Auprès d'eux, elle joue un rôle important dans les journées de la libération de Montpellier en août 1944. A la Libération, elle suit en politique Paul Boulet et est élue conseillère municipale en 1945, déléguée à l’assistance. Avec Laure Moulin, Héloïse Brun-Dumesnil et Marguerite Labraque-Bordenave, c’est l’une des toutes premières femmes à entrer au Conseil municipal, la seule à recevoir une délégation.
Installée à Assas après 1949 et propriétaire d’une fabuleuse collection d’instruments de musique anciens, elle devient à la fin de sa vie la protectrice du claveciniste américain Scott Ross. C’est l'une des grandes figures de la Résistance héraultaise. Une maison de retraite porte son nom à Montpellier.
Faits de Résistance de Simone Demangel. Attestation du capitaine Léon Bolivar sur son rôle dans la libération de Montpellier. Archives de Montpellier, 1 K 669.
Jeanne Demessieux (1921-1968)
Jeanne Demessieux, une enfant prodige
Musicienne, compositrice, Jeanne Demessieux fut une des premières femmes organiste à accéder à la célébrité et à faire une carrière internationale. Virtuose des claviers, ses enregistrements des œuvres de Bach, Franck ou Messiaen font encore référence. Son catalogue se compose d’une trentaine de pièces pour orgue, piano et de musique de chambre. Comme pédagogue, elle a enseigné l’orgue pendant deux ans au conservatoire de Nancy, puis fut nommée professeur d'orgue et d'improvisation au Conservatoire Royal de Liège en Belgique en 1952. Elle est considérée comme l’une des plus grands organistes du XXe siècle.
Jeanne Demessieux au grand orgue de l’église Saint-Sulpice à Paris, 1946. Archives de Montpellier, 4 S 20/42.
Jeanne Marie-Madeleine Demessieux est née le 13 février 1921 à Montpellier. Elle est le deuxième enfant d’Etienne Demessieux et de Madeleine Mézy. Elle révèle des talents musicaux très précoces à la suite d’une représentation d’Orphée et Eurydice de Gluck au théâtre de Montpellier. Elle se met à étudier le piano dès l’âge de quatre ans. Et c’est à cinq ans et demi qu’elle a sa première expérience, déterminante, sur l’orgue de l’église Saint-Mathieu. Elle entre au Conservatoire de Montpellier en 1928 dans la classe de Léonce Granier. Elle triomphe pour la première fois sur la scène du théâtre municipal en 1932 et remporte les Premiers prix de solfège et de piano. A la suite de ces succès, la famille s’installe à Paris pour la soutenir dans la préparation du concours d’entrée au Conservatoire national supérieur.
Jeanne Demessieux enfant, Aigues-Mortes, 1929. Archives de Montpellier, 4 S 20/73.
En octobre 1933, elle est brillamment admise dans la classe de piano de Simon Riera. Jeune prodige, on n’hésite pas à lui confier à seulement treize ans la responsabilité de l’orgue de l’église du Saint-Esprit, inauguré en décembre 1934 par Jehan Alain. Elle s’acquittera de cette tâche jusqu’en 1962.
Sa rencontre avec l’organiste Marcel Dupré, chef de l’école symphonique, en octobre 1936 marque un tournant décisif dans l’orientation de sa carrière comme organiste de concert et compositrice. Marcel Dupré devient plus qu’un maître, un véritable mentor, qui va polir son élève pendant près de dix ans. Il fonde sur elle tous ses espoirs. Frappé par tant de qualités, il veut lui transmettre les secrets de sa technique musicale et en faire son « digne successeur ». Il reçoit Jeanne à son domicile à Meudon pour des leçons particulières et lui permet d’accéder progressivement à partir de 1940 à la tribune du grand orgue Cavaillé-Coll de Saint-Sulpice, dont il est le titulaire. Durant les cinq années de la guerre, Dupré va préparer en toute discrétion Jeanne au lancement de sa carrière de soliste. Il organise sa première apparition publique avec une série de douze récitals à Pleyel en 1946-1948, au moment où il estime qu’elle a atteint le niveau d’excellence. Pour le public parisien, c’est une révélation. Le succès est immédiat. Mais en 1948, c’est la rupture avec son Pygmalion. Jeanne Demessieux vole désormais de ses propres ailes.
Jeanne Demessieux à l’orgue de l’église du Saint-Esprit à Paris, 1936. Archives de Montpellier, 4 S 20/29.
Itinérances, de la Camargue aux Amériques
Les concerts historiques donnés à la salle Pleyel lancent sa carrière internationale. Dans l’espace de vingt ans, elle donne plus de 700 récitals en France, au Royaume-Uni, en Belgique, aux Pays-Bas, en Suisse, en Allemagne, aux Etats-Unis et au Canada. Elle mène un rythme de vie effréné, entre les concerts dans le monde entier, les cours donnés à Nancy puis à Liège à partir de 1950 et les services religieux qu’elle doit assurer à Paris au Saint-Esprit puis à l’église de la Madeleine où elle est nommée titulaire de l’orgue en 1962, ce qui ne lui laisse que peu de temps pour la composition. Elle réalise en outre de nombreux enregistrements studio et remporte le Grand Prix du Disque de l’Académie Charles-Cros en 1960 pour l’intégrale de l’œuvre pour orgue de César Franck. En 1947, elle est la première femme invitée à jouer à Westminster Abbey et à Westminster Cathedral à Londres et bénéficie pour cela d’une autorisation spéciale de l’archevêque.
Elle triomphe également la même année au Royal Albert Hall et reviendra souvent par la suite en Grande-Bretagne. Partout, c’est le même enthousiasme. Elle effectue trois tournées aux Etats-Unis en 1953, 1955 et 1958. A chaque fois, elle enchaîne les récitals de ville en ville, dormant dans les trains, et se livre à un véritable marathon. Elle est épaulée dans ses voyages par ses parents qui l’accompagnent partout et la secondent. Affaiblie par une santé de nature fragile, cette cadence infernale la conduit vite à l’épuisement. Après 1961, elle se produit en public de plus en plus rarement. Elle meurt d’un cancer le 11 novembre 1968 à Paris, à l’âge de 47 ans.
Jeanne et Etienne Demessieux de retour de tournée, 1953. Archives de Montpellier, 4 S 20/11.
Durant toute son existence, la Camargue fut pour Jeanne Demessieux un refuge. Elle retourne tous les étés dans la maison familiale d’Aigues-Mortes, d’où est originaire sa mère. Elle s’y ressource et trouve le repos dans la simplicité de ce mas provençal, L’Oustaou.
Ses séjours se partagent entre balades à cheval dans les marais et baignades au Grau-du-Roi. Ainsi, en juillet 1938, elle écrit dans son journal : « Me voici dans mon pays de cigales et de chaleur. […] Vous seriez heureuse de constater le bien-être que je ressens ici ; le calme si subit qui m’entoure et la vie que je mène au milieu d’un paysage très aimé me libèrent l’esprit de tout pittoresque ce qui pouvait y être accumulé. La mer est à cinq kilomètres ; on y va à bicyclette avec une chaleur peu comparable le soir ; c’est une impression magnifique lorsqu’on revient au coucher du soleil. Quel plaisir de se rappeler ici l’Isle joyeuse ! Tout contribue à en faire ressentir la beauté. J’ai un piano à ma disposition et un pavillon isolé d’où l’horizon s’étend à perte de vue et dans lequel je compose. », (Archives de Montpellier, 4S1). Jeanne Demessieux repose au cimetière du Grau-du-Roi.
Jeanne Demessieux à cheval en Camargue, 1958. Archives de Montpellier, 4 S 20/31.
Louise Guiraud (1860-1918)
Née le 27 juillet 1860 dans l’hôtel Boussairolles (ancien hôtel du Gouvernement place de la Comédie démoli en 1892), Louise Roch Joséphine Guiraud est l’une des grandes historiennes de Montpellier.
Son œuvre comprend plus de vingt volumes allant de la topographie montpelliéraine au Moyen Âge à l’histoire de la Réforme, son dernier livre paru à la veille de sa mort. Fervente catholique, elle s’intéresse particulièrement à l’histoire religieuse de la ville. Membre de la Société archéologique depuis 1891, elle est aussi secrétaire générale de l’Œuvre de Notre-Dame-des-Tables.
Lors de la démolition de la Halle aux colonnes, place Jean-Jaurès, elle conduit les fouilles pour retrouver les vestiges de la crypte de l’église Notre-Dame-des-Tables détruite sous la Révolution. Elle s’occupe alors de la constitution d’un musée lapidaire. La guerre vient interrompre ce projet. Elle meurt le 6 mai 1918. Orpheline à la naissance, elle se préoccupe également beaucoup de l’éducation des jeunes filles. Une crèche porte son nom à Montpellier.
Louise Guiraud, Portraits de l’Hérault, Archives de Montpellier, 4 BIB 131.
Agnès Mac-Laren (1837-1913)
Première femme diplômée de la Faculté de Médecine de Montpellier, Agnès McLaren naît le 4 juillet 1837 à Edimbourg (Royaume-Uni). Elle milite d’abord pour le droit de vote des femmes en Ecosse. Désirant étudier la médecine mais refusée à Edimbourg, elle s’inscrit en 1876 à l'école de médecine de l'Université de Montpellier qui accepte les femmes.
Elle reçoit le titre de docteur en 1878 pour une thèse consacrée à l’« Etude sur les flexions de l’utérus ». Elle siège dès 1877 au conseil d'administration de la London School of Medicine pour les femmes et est élue en 1882 membre du Collège royal des médecins d'Irlande. Elle débute sa carrière au Cannongate Mission Médicale Dispensary d’Edimbourg et à Cannes, se partageant alors entre l’Ecosse et la France. A partir 1905, elle s’engage totalement dans des missions de médecine humanitaire en Inde à travers la Medical Mission Committee de Londres. Elle intervient particulièrement auprès des femmes indiennes qui, selon la coutume, ne peuvent être soignées par des hommes. Elle décède à Antibes le 17 avril 1913.
Registre d'inscription 1877-1889 de la Faculté de médecine. © Université de Montpellier. Archives de l’UFR de Médecine.
Hélène de Monténégro, reine d’Italie (1873-1952)
Née Jelena Petrović-Njegoš, elle est la fille du roi Nicolas Ier de Monténégro et de Milena Vukotic. Elle épouse en 1896 Victor-Emmanuel III, roi d'Italie de 1900 à 1946. Après la proclamation de la République, les membres de la famille royale de Savoie sont bannis du territoire italien. Veuve en 1947, elle vient alors à Montpellier pour soigner une tumeur maligne dans les services du professeur Paul Lamarque (1894-1970), directeur du Centre Régional de lutte contre le cancer. La famille Lamarque l’héberge dans sa propriété du mas de Rouet, rue de la Croix de Figuerolles, où elle trouve la mort le 28 novembre 1952.
Son tombeau, dû à l’architecte montpelliérain Marcel Bernard, s’élève au cimetière Saint-Lazare. Il est fait de marbres de différentes régions d’Italie en hommage à la défunte. Le long du mur extérieur, un buste sert de lieu de mémoire pour la communauté italienne. Ses cendres ont quitté Montpellier depuis décembre 2017 et rejoint la nécropole royale de Vicoforte dans le Piémont.
Tombeau de la reine d’Italie au cimetière Saint-Lazare. Archives de Montpellier, 6 Fi 1773.
Albine de Montholon (1780-1848)
Née à Paris au sein d’une famille de financiers montpelliérains, Albine Hélène de Vassal est célèbre pour avoir été la dernière maîtresse de Napoléon à Sainte-Hélène. Elle passe son enfance au château de la Fortelle, à Rozay-en-Brie, près de Paris. Après deux mariages malheureux, elle épouse en 1812 Charles Tristan de Montholon, maréchal de camp, général et comte d’Empire.
En 1815, par fidélité ou par nécessité, d’aucuns diront par intérêt, ce dernier suit l’Empereur dans son exil avec femme et enfants. A Sainte-Hélène, le charme d’Albine séduit Napoléon. En 1818, elle met au monde une petite fille, Joséphine-Napoléone, qui pourrait être la fille naturelle de l’Empereur, même si officiellement elle n’est que sa filleule. Mais en juillet 1819, elle quitte Sainte-Hélène avec ses enfants, officiellement pour raisons de santé, et vit en exil à Bruxelles. Revenue à Montpellier et à la religion, elle décède le 26 mars 1848. Sa dépouille embaumée était déposée dans un sarcophage de verre, aujourd’hui fermé, dans la crypte de la chapelle des Pénitents bleus (rue des Etuves).
Portrait présumé d’Albine de Montholon.
Marie de Montpellier (1180-1213)
Dernier seigneur de la lignée des Guilhem, Marie de Montpellier est la fille unique de Guilhem VIII et de « l’impératrice » Eudoxie Comnène, princesse byzantine très tôt répudiée par son époux. D’abord écartée de la succession en tant que femme, elle est proclamée héritière de la seigneurie après que ses demi-frères ont été déclarés illégitimes. Veuve du vicomte de Marseille et libérée du comte de Comminges après l’annulation de leur mariage, elle épouse le 15 juin 1204 le roi Pierre II d’Aragon et lui apporte en dot la seigneurie de Montpellier.
Dépouillée de ses biens par son mari et recluse au château de Collioure, elle revient sur le devant de la scène, portée par les Montpelliérains qui se révoltent contre le roi d’Aragon en 1207. C’est lors du siège de la ville, par un stratagème légendaire, que Marie tombe enceinte et donne naissance au futur roi Jacques Ier d’Aragon à Montpellier le 2 février 1208. Pierre II chassé du pouvoir, Marie est investie de la seigneurie en avril 1208, en dépit de la Coutume qui exclut les femmes. Elle doit ensuite batailler sans cesse contre son époux qui manœuvre avec son allié toulousain pour dissoudre leur union et rétablir sur son siège son demi-frère Guilhem IX. Partie plaider sa cause auprès du pape Innocent III, elle meurt à Rome le 19 avril 1213 et est inhumée dans la basilique Saint-Pierre.
Entrée de Marie de Montpellier et Pierre II d’Aragon à Montpellier par Edouard Marsal, Archives de Montpellier, 42 S 1.
Laure Moulin (1892-1974)
Sœur aînée de Jean Moulin, Laure Lucy Moulin est née à Saint-Andiol (Bouches-du-Rhône) le 3 décembre 1892. A partir de 1917, Jean et Laure Moulin vivent durant cinq ans ensemble à Montpellier pendant leurs études. Tandis que Jean suit un cursus de droit tout en travaillant à la Préfecture de l’Hérault, Laure prépare une licence de lettres à la Faculté et s’installe définitivement à Montpellier au 21 de la Grand-rue. Elle enseigne ensuite au collège Legouvé (aujourd’hui collège Clémence-Royer) l’anglais et le français. Pendant la guerre, elle seconde son frère dans son action clandestine de résistant.
Elle crée à la Libération le Foyer Jean-Moulin, 1, rue Embouque-d’or, aujourd’hui disparu. Elle est élue conseillère municipale en mai 1945, avec une mission d’administrateur du Centre communal d’Action sociale. Le 3 août 1962, elle est promue chevalier du mérite social pour son action. Gardienne de la mémoire de Jean Moulin, elle est l’auteur notamment d’une biographie parue en 1969. Elle décède le 31 décembre 1974 dans son domicile de la désormais Grand-rue-Jean-Moulin. Le club de l’Âge d’Or (centre d’animation pour les seniors affilié au CCAS) situé au 45, rue Frédéric-Bazille porte son nom.
Laure et Jean Moulin dans les Alpilles été 1936 © Archives famille Escoffier.
Laure Permon, duchesse d’Abrantès (1784-1838)
Femme de lettres, auteur de Mémoires sur la Révolution, l’Empire et la Restauration, Laure Adélaïde Constance Permon est née à Montpellier le 6 novembre 1784. Elle est la fille de Nicolas Auguste Charles Martin de Permon, receveur particulier des finances du diocèse de Narbonne, et de Laure Marie de Comnène, descendante des anciens empereurs de Constantinople.
Appartenant à la noblesse corse par sa mère, elle fait partie de l’entourage proche de Napoléon Bonaparte. Figure des salons du Directoire, elle épouse en 1800 Jean-Andoche Junot, futur général d’Empire et duc d’Abrantès. Veuve en 1813, elle se consacre ensuite à l’écriture et devient la maîtresse de Balzac. Elle meurt dans le plus grand dénuement à Paris le 7 juin 1838.
La duchesse d’Abrantès, gravure, XIXe s. Musée du Vieux Montpellier, D2011.0.153.
Germaine Richier (1902-1959)
Formée à l'école de Beaux-Arts de Montpellier, avant d'être l'élève de Bourdelle, Germaine Richier fait partie des plus grands sculpteurs du XXe siècle. Née à Grans près d’Arles (Bouches-du-Rhône) le 16 septembre 1902, elle grandit à Castelnau-le-Lez. Elle s’inscrit en 1920 aux Beaux-Arts, où elle est l’élève du sculpteur montpelliérain Guigues.
A la fin de sa scolarité en 1926, elle « monte » à Paris et devient la seule élève particulière d’Antoine Bourdelle jusqu’à la mort du maître en 1929. Son travail est remarqué et plusieurs fois primé, notamment lors de l’exposition universelle de 1937. Durant la Seconde Guerre mondiale, elle s’installe en Suisse. Proche d’Alberto Giacometti, son style évolue de figures humaines réalistes vers des formes hybrides (monstres, hydres, araignées,…).
A partir de 1947, ses sculptures sont entourées de fils de métal et après 1951, ses bronzes sont complétés de fonds colorés par Hans Hartung ou Veira da Silva.
Elle décède à Montpellier le 31 juillet 1959 et repose au cimetière de Mudaison. Une salle lui est consacrée au Musée Fabre qui présente entre-autres les œuvres suivantes : La Chauve-souris, Escrimeuse avec masque, L'Araignée I et Loretto I.
Salle Germaine Richier au Musée Fabre de Montpellier. © Photographie Steve Gavard - Reproduction interdite sans autorisation.
Albertine Sarrazin (1937-1967)
Romancière, écrivain sulfureux, Albertine Damien est née à Alger le 17 septembre 1937. Elève indisciplinée, elle est placée en maison de correction au Bon-Pasteur à Marseille jusqu’à sa majorité. Elle s’enfuit de l’établissement et mène une vie aventureuse. Après un hold-up raté, elle est arrêtée et incarcérée à la prison de Fresnes en 1953. Albertine commence alors à tenir ses carnets et à écrire des poèmes. En 1957, elle s'évade en sautant d'une hauteur de dix mètres et se brise l'astragale. Cet épisode lui inspirera son plus célèbre titre. En cavale, elle rencontre Julien Sarrazin, un petit voyou. Leur histoire d’amour commence dans la clandestinité. Ils se marient en 1959, entre deux gendarmes.
Tous deux libérés en 1964, ils s'installent dans les Cévennes puis aux Matelles en 1967. Elle se consacre alors totalement à l’écriture, racontant son expérience carcérale, la prostitution et la délinquance. Ses romans L'Astragale, La Cavale et La Traversière sont publiés successivement aux éditions Jean-Jacques Pauvert et connaissent un succès tant critique que public. Albertine Sarrazin, fragilisée par l'alcool, le tabac et sa vie chaotique, meurt le 10 juillet 1967 à 29 ans à la clinique Saint-Roch de Montpellier, des suites d'une opération.
Transcription de l’acte de décès d’Albertine Sarrazin dans le registre des décès de 1971, Archives de Montpellier, 3 E 195.
Lydie Wilson (1850-1880)
Née et morte à Paris, Lydie Wilson (1850-1880) est l’épouse de l’homme de lettres et homme politique Louis-Xavier de Ricard (1843-1911), partageant les goûts et les convictions de son mari. Elle l’épouse en 1873 après son retour d’exil en Suisse pour sa participation à la Commune de Paris. Ils s'installent d'abord au Mas du Diable à Castelnau-le-Lez, puis au Mas de La Lauseta au plan des Quatre-Seigneurs à Montpellier. Louis-Xavier de Ricard, chef de file des félibres « rouges » (républicains), anime l’almanach littéraire de La Lauseta. Dans ce milieu, Lydie de Ricard s’initie à la langue occitane et compose des poésies en occitan et en français.
Elle devient félibresse sous le nom de Na Dulciorella, nom donné par son parrain, le poète audois Auguste Fourès. Atteinte de la tuberculose, elle meurt en septembre 1880. Ses écrits ont été publiés chez Lemerre en 1891 dans un recueil posthume intitulé Aux bords du Lez. Sa dépouille a été transférée en 1998 au cimetière Saint-Lazare de Montpellier dans le cénotaphe érigé en hommage à Louis-Xavier de Ricard.
Tombée de soir - Toumbada de vespre, de Lydie Wilson, extrait du recueil Aux bords du Lez, Lemerre, 1891.